Traitement diurétique et résistance aux diurétiques
Auteurs:
Dr méd. Patrick Hofmann1,2
Prof. Dr méd. Thomas Fehr1,3
1 Department für Innere Medizin
Kantonsspital Graubünden, Chur
2 Physiologisches Institut, Universität Zürich
3 Universität Zürich
E-mail: patrick.hofmann@ksgr.ch
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L’hypervolémie due à une surcharge en sodium et à une surcharge volémique est la principale manifestation clinique de la maladie œdémateuse dans l’insuffisance cardiaque, rénale ou hépatique. Bien que les diurétiques fassent partie du quotidien clinique depuis des décennies, de nouvelles classes thérapeutiques et des données d’études récemment publiées posent à présent les bases d’un traitement diurétique ciblé basé sur la physiopathologie.
Keypoints
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La compréhension de la courbe dose-efficacité est importante pour le dosage correct et l’adaptation de la dose des diurétiques de l’anse. L’ajustement posologique signifie doubler la dose.
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Outre la diurèse et l’évolution du poids, le taux de sodium urinaire est un paramètre simple et important du point de vue pronostique pour évaluer l’efficacité des diurétiques.
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La résistance aux diurétiques peut être attribuable à des causes extrarénales et rénales. En plus d’une administration parentérale et d’un ajustement posologique correct, le choix des diurétiques en association en fonction des taux d’électrolytes, de la métabolisation et des comorbidités est décisif.
Après quasiment 50 ans d’utilisation clinique, les diurétiques de l’anse restent un pilier important du traitement des maladies œdémateuses. Ils agissent au niveau du cotransporteur Na+-K+-2Cl– (NKCC2) situé au niveau luminal dans la partie épaisse et ascendante de l’anse de Henle. Il est particulièrement important, pour une utilisation correcte, de savoir que la courbe dose-efficacité est logarithmique et linéaire. Cela signifie qu’après la valeur seuil, une grande dose supplémentaire de diurétique est nécessaire pour induire une faible natriurèse supplémentaire (Fig. 1). Il est donc recommandé de doubler la dose en cas d’effet diurétique insuffisant. En outre, l’évolution de cette courbe dose-efficacité dépend de la présence éventuelle d’une maladie sous-jacente. Ainsi, elle est déplacée vers la droite en cas d’insuffisance rénale chronique et aplanie en cas d’insuffisance cardiaque. Les diurétiques font donc partie des rares médicaments dont la dose doit être augmentée en cas d’insuffisance rénale chronique.1,2
Fig. 1: Courbe dose-efficacité des diurétiques de l’anse
Les sites et les mécanismes d’action des différentes classes de diurétiques sont présentés dans la Figure 2. Les diurétiques actifs dans le tubule proximal sont des inhibiteurs de l’anhydrase carbonique (p.ex. acétazolamide), qui entraînent une perte rénale de bicarbonate et une natriurèse légère. Les inhibiteurs du cotransporteur sodium-glucose 2 (SGLT2; dapagliflozine, empagliflozine, canagliflozine) ont également une action proximale et induisent à la fois une glycosurie avec diurèse osmotique et une natriurèse légère.
Fig. 2: Site d’action des classes de diurétiques le long du système tubulaire
Les deux diurétiques à action proximale entraînent une augmentation de la concentration en chlorure dans le système tubulaire distal et, par conséquent, une activation du rétrocontrôle tubuloglomérulaire avec vasoconstriction de l’artériole glomérulaire afférente et une amélioration de l’efficacité des diurétiques de l’anse.3
Les diurétiques thiazidiques (hydrochlorothiazide) et les diurétiques de type thiazidique (p.ex. indapamide, chlorothalidone, métolazone) agissent dans le tubule distal et entraînent une natriurèse plus importante que les diurétiques de l’anse. Les diurétiques d’épargne potassique englobent les inhibiteurs des canaux sodiques épithéliaux (ENaC, comme l’amiloride et le triamtérène) et les antagonistes du récepteur des minéralocorticoïdes. Ces derniers constituent la seule classe de diurétiques qui n’agissent pas par voie luminale, mais par l’intermédiaire d’un récepteur nucléaire, ce qui entraîne un délai d’action de 2 à 3 jours.
Dans le tube collecteur, les vaptans (p.ex. tolvaptan) inhibent l’incorporation de l’aquaporine via les récepteurs V2 de la vasopressine et entraînent ainsi une augmentation de l’aquarèse.
Effets indésirables d’un traitement diurétique
Les effets secondaires des diurétiques les plus fréquemment observés dans la pratique clinique quotidienne sont des déséquilibres électrolytiques et acido-basiques (Tab. 1). En particulier, il est utile dans le choix des diurétiques en association de tenir compte de l’influence sur le sodium, le potassium, le chlorure et le bicarbonate.
Tab. 1: Variations électrolytiques associées aux différentes classes de diurétiques. Les grandes flèches indiquent la variation de l’électrolyte principal provoqué par la classe de diurétiques correspondante
Environ le tiers des patients hospitalisés pour une insuffisance cardiaque présentent une atteinte rénale aiguë. Elle est principalement due à une congestion veineuse et à une hémoconcentration sous traitement diurétique et est rarement l’expression d’une réelle atteinte rénale structurelle.4–6
Parmi les autres effets secondaires fréquents, on note l’hyperuricémie (qui peut être influencée favorablement par les inhibiteurs du SGLT2 (iSGLT2) en raison de leur effet uricosurique léger) et la déplétion en thiamine due aux diurétiques de l’anse à forte dose.
Efficacité des diurétiques et résistance aux diurétiques
La résistance aux diurétiques peut être définie d’une part qualitativement comme une décongestion insuffisante malgré une dose maximale de diurétique et d’autre part quantitativement comme une diurèse <100ml/h dans les 6 premières heures, une diurèse totale <3l/24h ou un taux de sodium au spot urinaire <50mmol/l.1,7 La natriurèse et le bilan sodique, en particulier, sont de bons paramètres pronostiques pour la réhospitalisation et la mortalité cardiovasculaire.8–10 Dans l’étude PUSH-AHF publiée récemment, un protocole diurétique reposant sur le taux de sodium urinaire a été étudié pour la première fois de manière prospective et randomisée. Une diurèse et une natriurèse accrues ont pu être confirmées.11
Les mécanismes physiopathologiques de la résistance aux diurétiques sont multiples. Ils peuvent être divisés en une concentration/absorption insuffisante du diurétique (attribuable à la congestion viscérale ou à une hypoalbuminémie grave), une sécrétion limitée du diurétique dans le système tubulaire (p.ex. par des AINS) et des mécanismes compensatoires du système tubulaire. Le Tableau 2 présente quelques exemples et options thérapeutiques possibles en cas de résistance aux diurétiques.
Tab. 2: Mécanismes et approches thérapeutiques dans la résistance aux diurétiques
Les approches thérapeutiques consistent à augmenter les doses de diurétiques de l’anse (doublement) et à ajuster les intervalles d’administration. Le furosémide a une demi-vie d’élimination d’environ 2heures, de sorte que, d’un point de vue physiologique, il est judicieux d’administrer le médicament trois fois par jour plutôt que deux fois par jour, comme c’est souvent le cas.12 En particulier en raison du fait qu’il se produit une «résorption de sodium par effet rebond» compensatoire dans la période qui suit l’administration.1
En ce qui concerne l’administration «continue» plutôt qu’en «bolus» des diurétiques de l’anse, les données ne sont pas concluantes. Le fameux essai DOSE n’a pas mis en évidence de différence entre les deux stratégies, mais certaines études montrent que chez les personnes à haut risque de résistance aux diurétiques, présentant une insuffisance rénale ou une hypotension, en particulier, l’administration continue a un meilleur effet diurétique.13,14
L’hypochlorémie, favorisée ou aggravée par les diurétiques de l’anse ou les thiazides, est un mécanisme de résistance aux diurétiques souvent trop peu pris en compte. Même une hypochlorémie légère multiplie le risque de résistance aux diurétiques et constitue un marqueur pronostique défavorable pour la réhospitalisation et la mortalité.15–19 Les mécanismes pathologiques sont une régulation positive de NKCC2 et NCC par hypochlorémie et une activation du système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA).
Nouveaux aspects des diurétiques dans les maladies cardiorénales
Avec ADVOR (diurétiques de l’anse + acétazolamide), EMPULSE (diurétiques de l’anse + empagliflozine) et CLOROTIC (diurétiques de l’anse + hydrochlorothiazide), trois des études innovatrices sur les diurétiques en association dans l’insuffisance cardiaque décompensée ont été publiées cette année ou l’année dernière.20–22 En résumé, toutes les associations sont efficaces et induisent une augmentation de la diurèse. En ce qui concerne les critères d’évaluation de la sécurité, seule l’association avec des thiazides a montré une augmentation des troubles électrolytiques (hypokaliémie) et des lésions rénales aiguës.
L’acétazolamide semble particulièrement prometteur, car des analyses post-hoc de l’étude ADVOR ont montré des avantages supplémentaires en présence d’une alcalose métabolique (HCO3– >27mmol/l), d’une hypochlorémie ou d’un débit de filtration glomérulaire estimé (DFGe) limité.
Les iSGLT2 seront à l’avenir plutôt relégués au second plan en ce qui concerne leur importance dans le traitement aigu et deviendront la pierre angulaire du traitement de l’insuffisance cardiaque chronique, indépendamment de la fonction de pompage du ventricule gauche. Dans la phase aiguë, les iSGLT2 ont divers effets bénéfiques, par exemple l’effet uricosurique et l’effet d’épargne du magnésium, l’amélioration du drainage du liquide interstitiel et de l’hémoconcentration ainsi que l’amélioration de l’érythropoïèse et du métabolisme du fer.23 D’après les données des études, le traitement par iSGLT2 peut être poursuivi en cas d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque ou (si aucun traitement n’est encore en place) être amorcé tôt.
Traitement diurétique basé sur la physiopathologie
Avec les nouvelles classes de diurétiques et du fait de la meilleure compréhension de leur mode d’action sur le plan physiopathologique, les conditions sont réunies pour un traitement diurétique plus personnalisé chez les personnes atteintes de maladies cardiorénales. Avec le sodium urinaire, on dispose désormais d’un paramètre de mesure validé qui permet une adaptation individuelle précoce de la dose des diurétiques de l’anse. Les iSGLT2 peuvent être utilisés tôt dans une association de diurétiques en vue d’améliorer le pronostic. La place de l’acétazolamide dans le traitement précoce en association avec les diurétiques de l’anse et les iSGLT2 n’est pas encore claire; des études futures permettront, espérons-le, d’y voir plus clair. En présence de résistance aux diurétiques malgré une augmentation correcte des doses, le traitement optimal par diurétiques en association peut être choisi sur la base des valeurs électrolytiques (sodium, potassium, chlorure), du pH et des comorbidités. Le Tableau 3 décrit des modèles d’électrolytes courants et des approches thérapeutiques possibles, avec mention des études correspondantes.
Tab. 3: Traitement diurétique basé sur la physiopathologie
Divulgation:
Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien financier ou personnel en rapport avec cette contribution.
Littérature:
1 Ellison DH, Felker GM: Diuretic treatment in heart failure. N Engl J Med 2017; 377: 1964-75 2 Novak JE, Ellison DH: Diuretics in states of volume overload: core curriculum 2022. Am J Kidney Dis 2022; 80: 264-76 3 Packer M et al.: Critical analysis of the effects of SGLT2 inhibitors on renal tubular sodium, water and chloride homeostasis and their role in influencing heart failure outcomes. Circulation 2023; 148: 354-72 4 Forman DE et al.: Incidence, predictors at admission, and impact of worsening renal function among patients hospitalized with heart failure. J Am Coll Cardiol 2004; 43: 61-7 5 Mullens W et al.: Importance of venous congestion for worsening of renal function in advanced decompensated heart failure. J Am Coll Cardiol 2009; 53: 589-96 6 Ahmad T et al.: Worsening renal function in patients with acute heart failure undergoing aggressive diuresis is not associated with tubular injury. Circulation 2018; 137: 2016-28 7 Hoorn EJ, Ellison DH: Diuretic resistance. Am J Kidney Dis 2017; 69: 136-42 8 Hodson DZ et al.: Natriuretic response is highly variable and associated with 6-month survival insights from the ROSE-AHF trial. JACC: Heart Fail 2019; 7: 383-91 9 Martens P et al.: Assessing intrinsic renal sodium avidity in acute heart failure: implications in predicting and guiding decongestion. Eur J Heart Fail 2022; 24: 1978-87 10 Verbrugge FH et al.: Natriuretic response to acetazolamide in patients with acute heart failure and volume overload. J Am Coll Cardiol 2023; 81: 2013-24 11 ter Maaten JM et al.: Natriuresis-guided diuretic therapy in acute heart failure: a pragmatic randomized trial. Nat Med 2023; 29: 2625-32 12 Huang X et al.: Everything we always wanted to know about furosemide but were afraid to ask. Am J Physiol Renal 2016; 310: 958-71 13 Felker GM et al.: Diuretic strategies in patients with acute decompensated heart failure. N Engl J Med 2011; 364: 797-805 14 Frea S et al.: Diuretic treatment in high-risk acute decompensation of advanced chronic heart failure – bolus intermittent vs. continuous infusion of furosemide: a randomized controlled trial. Clin Res Cardiol 2020; 109: 417-25 15 Testani JM et al.: Hypochloraemia is strongly and independently associated with mortality in patients with chronic heart failure. Eur J Heart Fail 2016; 18: 660-8 16 ter Maaten JM et al.: Hypochloremia, diuretic resistance, and outcome in patients with acute heart failure. Circ Heart Fail 2018; 9: 003109 17 Hanberg JS et al.: Hypochloremia and diuretic resistance in heart failure. Circ Heart Fail 2018; 9: 003180 18 Grodin JL et al.: Importance of abnormal chloride homeostasis in stable chronic heart failure. Circ Heart Fail 2018; 9: 002453 19 Grodin JL et al.: Prognostic role of serum chloride levels in acute decompensated heart failure. J Am Coll Cardiol 2015; 66: 659-66 20 Mullens W et al.: Acetazolamide in acute decompensated heart failure with volume overload. N Engl J Med 2022; 387: 1185-95 21 Voors AA et al.: The SGLT2 inhibitor empagliflozin in patients hospitalized for acute heart failure: a multinational randomized trial. Nat Med 2022; 28: 568-74 22 Trullàs JC et al.: Combining loop with thiazide diuretics for decompensated heart failure: the CLOROTIC trial. Eur Heart J 2022; 44: 411-21 23 Biegus J et al.: Sodium–glucose cotransporter-2 inhibitors in heart failure: potential decongestive mechanisms and current clinical studies. Eur J Heart Fail 2023; 25: 1526-36
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