Gestion des poussées aiguës de colite ulcéreuse
Auteur:
Dr méd. Hans Peter Gröchenig
Abteilung für Innere Medizin
Barmherzige Brüder
Krankenhaus St. Veit/Glan
E-mail: hanspeter.groechenig@bbstveit.at
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La colite ulcéreuse est une maladie inflammatoire chronique de l’intestin qui peut avoir un impact considérable sur la vie des personnes qui en souffrent. Une poussée aiguë pose des défis particuliers tant aux patients qu’aux médecins et nécessite un traitement soigneusement adapté. Cet article a pour but de donner un aperçu des méthodes de traitement et des approches thérapeutiques recommandées en se basant sur les directives internationales1–3 actuellement en vigueur.
Définition d’une poussée
Dans une étude rétrospective (cohorte IBSEN), 33% de toutes les personnes concernées âgées de plus de 10 ans font état de troubles intestinaux chroniques persistants ou chroniques intermittents, soit le signe d’un contrôle insuffisant de la maladie.4 La poussée d’une colite ulcéreuse ou une évolution active de la maladie se distingue d’une rémission de la maladie sous-jacente, qui est définie par ≤3 selles par jour, l’absence de sang dans les selles et un sous-score endoscopique de Mayo de 0. Sur la base des critères adaptés de Truelove et Witts, une maladie active est classée en trois degrés de sévérité (légère, modérée, sévère) (Tab. 1). Comme l’indique également la directive S3 actuelle1, il convient toutefois de prouver objectivement l’existence d’une activité inflammatoire avant d’instaurer un traitement anti-inflammatoire de la poussée. Cela peut se faire sur la base du tableau clinique prédominant (fréquence des selles, diarrhée sanglante, fièvre), des paramètres de laboratoire (calprotectine, CRP, hémoglobine) ainsi que des résultats échographiques (épaisseur de la paroi intestinale) et endoscopiques, y compris l’examen histologique. Les diagnostics différentiels d’une poussée aiguë doivent toujours être pris en compte et une infection intestinale, y compris à Clostridioides difficile, ou une surinfection à cytomégalovirus (CMV) (surtout chez les patients déjà immunodéprimés) doivent être exclues dans tous les cas.
Tab. 1: Classification de l’activité de la maladie dans la colite ulcéreuse (modifié selon Magro F et al. 2017)9
Traitement d’une poussée aiguë
En cas d’activité légère à modérée d’une colite ulcéreuse, il convient en premier lieu d’optimiser/d’augmenter la dose du traitement par 5-ASA. En cas de poussée, il est recommandé d’administrer du 5-ASA par voie orale à raison de ≥3g/j, y compris un traitement local supplémentaire par voie rectale à l’aide de suppositoires, de mousse ou de suspension de 5-ASA. Ce traitement peut être complété par une préparation de cortisone à action locale (budésonide MMX 9mg/j) en cas de réponse insuffisante ou d’intolérance. Un traitement systémique par la cortisone (0,5–1mg/kgPC/j) doit être initié si la poussée inflammatoire ne peut pas être contrôlée par les essais thérapeutiques mentionnés précédemment. En cas de poussées récidivantes ou d’évolution réfractaire à la cortisone ou cortisonodépendante, il y a une indication à poursuivre l’escalade thérapeutique. Pour cela, il est possible de recourir à un large choix de médicaments autorisés (thiopurines, anticorps, «small molecules») (Tab. 2). Les inhibiteurs du TNF (infliximab, adalimumab, golimumab) et le védolizumab, un bloqueur de l’intégrine, sont cités par la directive S3 en vigueur1 comme appartenant au niveau de preuves 1, tous les autres médicaments disponibles au niveau de preuves 2.
Tab. 2: Médicaments (anticorps, «small molecules») dans la colite ulcéreuse (modifié selon Kucharzik T et al. 2024)1
Le choix de la préparation adéquate doit prendre en compte de nombreux critères de décision tels que le potentiel d’effets secondaires, l’âge et les comorbidités du patient, l’activité de la maladie, la rapidité de la réponse à l’effet, une éventuelle non-réponse aux traitements antérieurs, les limites nationales de remboursement et l’expérience personnelle avec les substances disponibles.
Dans cette indication, nous disposons uniquement d’une étude de comparaison directe randomisée en double aveugle de l’adalimumab et du védolizumab. Dans cette étude, les patients sous traitement par le védolizumab à dose standard ont montré une meilleure réponse (obtention d’une rémission clinique et amélioration endoscopique) que sous adalimumab pendant la période d’observation de 52 semaines.5
Colite ulcéreuse sévère aiguë
La colite ulcéreuse (fulminante) sévère aiguë constitue une urgence médicale, elle est définie par ≥6 diarrhées sanglantes par jour, une fièvre >37,8°C, une tachycardie >90/min, une anémie avec Hb <75% de la valeur normale et une VS >30mm/h (critères de Truelove et Witts). Dans ce cas, le patient doit être hospitalisé avec instauration rapide d’une corticothérapie systémique (1mg/kgPC d’un équivalent de la prednisolone) sous thromboprophylaxie adaptée. Les surinfections doivent être exclues (C. difficile, CMV) et la prise en charge doit inclure la chirurgie en raison de l’éventuelle nécessité d’une colectomie. La poussée peut être contrôlée par un traitement par la cortisone par IV chez 60 à 70% des personnes concernées, 20 à 25% répondent à un traitement médicamenteux de secours, 15% subissent une colectomie d’urgence et, malheureusement, une mortalité de 1% de toutes les personnes concernées est rapportée dans des séries de cas.6 Si aucune amélioration clinique n’est constatée après trois jours de cortisone (critères d’Oxford) et que la fréquence des selles reste >8/j ou 3–8/j et que la CRP est >45mg/l, il y a 85% de chances qu’une colectomie soit nécessaire. Dans ce cas, il convient de passer à un traitement de secours.
Les possibilités dont nous disposons aujourd’hui sont l’inhibiteur de la calcineurine ciclosporine, l’inhibiteur du TNF infliximab et le tacrolimus. Une efficacité a été démontrée pour ces médicaments en cas d’évolution réfractaire aux stéroïdes, la plupart des preuves étant disponibles pour la ciclosporine et l’infliximab. La ciclosporine est administrée à raison de 2mg/kgPC avec un taux sérique thérapeutique de 250–400ng/ml. Les effets secondaires rapportés sont principalement une néphrotoxicité, des paresthésies, une hypertension et une diminution du seuil de convulsion, de sorte qu’il convient de passer à un autre traitement d’entretien en cas de réponse dans les 3 à 6 mois. Pour l’infliximab, un inhibiteur du TNF, plusieurs études (CYSIF, CONSTRUCT)7,8 n’ont démontré aucune infériorité par rapport à la ciclosporine. La posologie est de 5mg/kgPC aux semaines 0–2–6, mais des doses allant jusqu’à 10mg/kgPC et/ou des schémas à intervalles raccourcis sont aussi utilisés en raison du «drug clearing» accru en cas d’évolution sévère (perte entérale de protéines). Dans une étude récemment publiée sous forme de résumé (Predict-UC), aucune supériorité réelle n’a cependant pu être démontrée à ce jour pour un schéma d’induction accéléré ou intensifié. Le tacrolimus peut également être utilisé dans cette situation, mais il faut viser des taux sériques de 5 à 15ng/ml.
Perspectives
À l’avenir, il est probable que les inhibiteurs de JAK élargiront également l’éventail des options thérapeutiques dans cette indication. Des résultats prometteurs ont déjà été rapportés pour l’inhibiteur pan-JAK tofacitinib (étude Triumph-UC) et l’inhibiteur sélectif de JAK-1 upadacitinib dans la colite ulcéreuse sévère aiguë. Actuellement, cette application doit toutefois être réservée à des services spécialisés et expérimentés.
Conclusion
La prise en charge d’une poussée aiguë de colite ulcéreuse nécessite un diagnostic précis et une approche thérapeutique échelonnée. Les poussées légères à modérées peuvent souvent être traitées par une optimisation du traitement par 5-ASA et des corticostéroïdes locaux, tandis que les poussées sévères nécessitent une prise en charge hospitalière intensive et éventuellement un traitement de secours. Une collaboration interdisciplinaire est essentielle pour obtenir les meilleurs résultats thérapeutiques possibles et minimiser les complications.
Littérature:
1 Kucharzik T et al.: Aktualisierte S3-Leitlinie Colitis ulcerosa. Version 6.2. Z Gastroenterol 2024; 62: 769-858 2 Raine T et al.: ECCO Guidelines on therapeutics in ulcerative colitis: medical treatment. J Crohn‘s Colitis 2022; 16: 2-17 3 Spinelli A et al.: ECCO Guidelines on therapeutics in ulcerative colitis: surgical treatment. J Crohn‘s Colitis 2022; 16: 179-89 4 Monstad I et al.: Outcome of ulcerative colitis 20 years after diagnosis in a prospective population-based inception cohort from south-eastern Norway, the IBSEN Study. J Crohn´s Colitis 2021; 15: 969-79 5 Sands B et al.: Vedolizumab versus adalimumab for moderate-to-severe ulcerative colitis. N Engl J Med 2019; 381: 1215-26 6 Rivière P et al.: Acute severe ulcerative colitis management: unanswered questions and latest insights. Lancet Gastroenterol Hepatol 2024; 9: 251-62 7 Laharie D et al.: Ciclosporin versus infliximab in patients with severe ulcerative colitis refractory to intravenous steroids: a parallel, open-label randomised controlled trial. Lancet 2012; 380: 1909-15 8 Williams JG et al.: Infliximab versus ciclosporin for steroid-resistant acute severe ulcerative colitis (CONSTRUCT): a mixed methods, open-label, pragmatic randomised trial. Lancet Gastroenterol Hepatol 2016; 1: 15-24 9 Magro F et al.: Third European evidence-based consensus on diagnosis and management of ulcerative colitis. Part 1: definitions, diagnosis, extra-intestinal manifestations, pregnancy, cancer surveillance, surgery, and ileo-anal pouch disorders. J Crohns Colitis 2017; 11:649-70
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